Bien que les semis aient été relativement précoces au printemps, le mois d’avril particulièrement froid et les intempéries des mois de mai, juin et juillet ont eu un impact négatif sur le rendement qui, selon les dernières prévisions de l’Institut Royal pour l’Amélioration de la Betterave (IRBAB), se situerait autour de la moyenne des 10 dernières années. Le temps chaud du mois d’août et de début septembre a permis un rattrapage au niveau de la teneur en sucre, mais le rendement racine reste relativement bas.
Après la campagne record que fut 2011 (avec ses 90 tonnes de betteraves à 16° en sucre par hectare), les prévisions pour cette campagne oscillent autour des 78 tonnes de betteraves à 16°Z. A l’est du pays, les rendements pourraient être un peu plus élevés compte tenu des semis plus précoces et des conditions climatiques plus favorables.
APPEL AUX RESPONSABLES POLITIQUES EUROPÉENS POUR UNE PRISE DE DÉCISION OBJECTIVE ET FONDÉE
Alors que la nouvelle campagne a commencé dans la plupart des pays producteurs de sucre en Europe, les responsables politiques européens poursuivent le débat sur l’avenir de la filière. Il y a tout juste 1 an, outragés, les betteraviers belges et européens réagissaient à la proposition de la Commission de supprimer, à partir du 30 septembre 2015, le règlement sucre* en vigueur. (*Le règlement sucre actuel repose sur le triptyque « quotas sucriers, accords interprofessionnels et prix minimal de la betterave », mais il contient également d’importants instruments de gestion du marché : ceux-ci permettent à la Commission d’intervenir en cas de déficit ou de surplus de sucre afin d’assurer la stabilité du marché sucrier européen).
Le Parlement Européen et le Conseil Européen se pencheront dès cet automne et dans le courant de l’année prochaine sur la proposition de la Commission. Depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, toute décision doit se prendre sur base d’une codécision. Le Parlement Européen s’est prononcé deux fois explicitement en faveur de la prolongation du règlement sucre actuel : tant le rapport Dess (juillet 2011) que le rapport Dantin (juillet 2012) allaient dans ce sens. Au Conseil Européen, une grande majorité d’états membres s’est également prononcée en faveur de la prolongation des quotas sucriers jusqu’en 2020. La Commission, quant à elle, maintient sa position.
Les betteraviers belges appellent les responsables politiques à prendre une décision objective et fondée. Ils demandent avec insistance aux responsables européens de prendre en compte les conséquences néfastes que susciteraient la suppression prématurée du règlement sucre actuel pour eux-mêmes, bien sûr, mais également pour les consommateurs, l’industrie utilisatrice de sucre et les fabricants de sucre au niveau européen. Les betteraviers rappellent que l’OCM Sucre (Organisation Commune du Marché) actuelle a déjà prouvé son efficacité à maintes reprises.
PLAIDOYER POUR LE MAINTIEN DE LA PRODUCTION SUCRIÈRE EN BELGIQUE ET EN EUROPE
Après la réforme sucrière de 2006, l’Union Européenne est devenue importatrice nette de sucre à hauteur de 15% de sa consommation. Son degré d’auto-approvisionnement en sucre est descendu à 85%. Le règlement sucre actuel (quotas sucriers inclus) est pour le secteur garant du maintien de la production de sucre en Belgique et en Europe. Il évite à l’Europe de devenir trop dépendante du marché sucrier mondial extrêmement volatil et assure un approvisionnement suffisant en ucre pour le consommateur et l’industrie utilisatrice de sucre.
FOCUS SUR LES RISQUES LIÉS À LA SUPPRESSION DES QUOTAS SUCRIERS: CE QUE LES OPPOSANTS AUX QUOTAS NE VOIENT PAS (OU REFUSENT DE VOIR)
La baisse du revenu betteravier est évidemment une des préoccupations majeures de la CBB. L’incertitude que cause la baisse du prix de la betterave au niveau de la rentabilité de la culture est une menace réelle pour l’approvisionnement en matières premières pour les sucreries et menace aussi la sécurité alimentaire du consommateur et de l’industrie utilisatrice de sucre. Les opposants des quotas sont persuadés que sans quotas, il y aura une plus grande disponibilité de sucre et, surtout, du sucre moins cher. Ils prétendent qu’« un marché libre permettra aux planteurs les plus compétitifs d’augmenter leur production ». Mais les opposants oublient un élément clef dans leur raisonnement : le prix de la betterave et la possibilité pour l’agriculteur d’opter pour une culture de substitution dès que la rentabilité de la betterave serait mise en question. Le rendement financier des cultures de substitution formeront donc un facteur déterminant dans le choix de la culture par l’agriculteur.
Autre grand risque lié à la proposition de la Commission Européenne d’en finir avec les quotas sucriers est la détérioration de la compétitivité de la filière betterave-sucre. Le cadre économique stable qu’instaure l’actuelle OCM Sucre stimule les investissements et les efforts en recherche et développement qui sont cruciaux pour que la filière fasse encore plus de progrès en matière de gains de productivité.
POURQUOI DEMANDER UN SURSIS JUSQU’EN 2020 ? LAISSER-NOUS LE TEMPS DE PARACHEVER NOTRE PROCESSUS D’AMÉLIORATION DE COMPÉTITIVITÉ !
En Europe, la réforme sucre de 2006 fut drastique, mais elle a comme mérite d’avoir augmenté considérablement la compétitivité de la filière, tant en tonnes de betteraves par ha qu’en tonnes de sucre par ha. Le processus d’amélioration de notre compétitivité n’est pas encore achevé ni à ce jour, ni demain en 2015 et l’industrie sucrière européenne ne sera pas encore prête pour affronter la concurrence sur le marché mondial. Au niveau du marché mondial, les principaux producteurs de sucre sont des pays émergents. Ils bénéficient, de ce fait, d’une structure de coûts très avantageuse à laquelle nos fabricants de sucre européens sont encore incapables, aujourd’hui, de faire face. Mais les coûts augmentent très fortement dans ces économies émergentes et leur avantage comparatif à ce niveau diminue d’année en année.
En demandant de reconduire le règlement sucre au minimum jusqu’en 2020, nous espérons donc, d’une part, diminuer notre handicap concurrentiel en matière de coûts et, d’autre part, encore augmenter nos rendements. Depuis 2000, la hausse moyenne en rendement sucre à l’hectare dans l’Union Européenne s’élève à 2-4% par an. Grâce à d’ambitieux projets de recherche et développement sur le génome de la betterave, la filière espère maximaliser sa compétitivité.
Les planteurs belges réunis au sein de la CBB appellent les responsables politiques européens de tenir compte de leur argumentation lorsqu’ils devront se pencher sur la proposition de la Commission Européenne de supprimer l’actuel régime sucre dès 2015.