En effet, en ne produisant que 8 % de la viande d’agneau que le Belge consomme, le secteur ovin belge et wallon reste un secteur agricole trop marginal. Un taux d’auto-approvisionnement si faible ne permet pas de maintenir une relation de saine concurrence entre l’offre locale et l’offre importée. A titre de comparaison, l’Union européenne produit 85% de la viande ovine qu’elle consomme.
Plus de 90% de la viande d’agneau consommée sur le territoire est importée
Malgré ses atouts, et des signes de développement encourageants (voir infra), la filière ovine wallonne doit se renforcer et se professionnaliser pour faire face à la concurrence. Concrètement, une étude menée par le CRIOC en 2012 montrait que 41% des Wallons pensent que la viande d’agneau qu’ils achètent est d’origine locale, alors que 92% est en réalité importée.
En plus du faible volume produit en Wallonie, la production de viande d’agneau est saisonnière et donc pas toujours disponible de façon régulière. Autre facteur en défaveur de l’agneau local : la délocalisation d’une partie de la filière, avec une estimation de seulement 20% des agneaux abattus en Wallonie.
Et malheureusement, malgré une viande wallonne exclusivement fraiche (versus une viande importée majoritairement réfrigérée) les atouts des pays concurrents ne manquent pas : la sélection de morceaux uniquement nobles par les pays qui exportent, la longue durée de conservation de la viande, une offre très homogène et régulière qui séduit nos bouchers, des coûts de production pouvant être jusqu’à 5 fois inférieurs aux coûts wallons.
Travailler sur l’image de la production locale, une nécessité pour assurer l’avenir de la production
Telles sont en effet les deux particularités indissociables de la production ovine wallonne : trop peu d’agneaux donc trop peu d’organisation commerciale et trop peu d’organisation commerciale donc trop peu d’agneaux !
A l’heure où la tendance au « consommons local » s’intensifie, on pourrait espérer que la professionnalisation et le travail sur « une image qualité » pourraient jouer en la faveur de la consommation d’agneaux wallons… C’est en effet le constat qu’ont dressé les acteurs de la filière, au cours notamment des Assemblées sectorielles du Collège des Producteurs : il est nécessaire de développer une image de l’agneau local, de recourir aux techniques du marketing, d’améliorer la distribution de la viande d’agneau et de développer une production plus concertée avec les bouchers.
Avec la sortie du Royaume-Uni (25% importations ovines en Belgique) de l’Europe, les questions ovines seront également largement débattues lors du Congrès de la FNO (Fédération Nationale Ovine Française) qui se déroule pour la première fois en Belgique, du 26 au 28 avril au LEC de Libramont.
Caractéristiques de la production ovine en Wallonie
Selon les dernières statistiques SANITEL, on recense en Wallonie 5 030 élevages hobbyistes contre seulement 459 élevages professionnels. Mais une phase de changement commence à se faire ressentir : en 5 ans, le nombre d’éleveurs professionnels (c’est-à-dire dont le cheptel comprend minimum 30 brebis) a été multiplié par 1,4 passant de 320 en 2010 à 459 éleveurs en 2015.
Pour faire de la spéculation ovine l’atelier principal d’une exploitation agricole occupant un éleveur à temps plein, il faut compter aux alentours des 400 brebis (hors commercialisation en circuit court ou hors spéculation laitière). En Wallonie, seulement 36 éleveurs professionnels tirent un revenu principal de cette spéculation avec un cheptel de plus de 200 brebis. Les 423 « autres professionnels » du secteur le sont donc en activité complémentaire à un emploi extérieur, ou dans le cadre d’une diversification des activités de leur exploitation agricole principale.
L'élevage ovin wallon professionnel est principalement axé sur la production de viande et l’entretien des réserves naturelles, et seulement 14 éleveurs sur les 459 professionnels ont une vocation laitière. Avec une production annuelle de 250 litres de lait par brebis, le taux d’auto-approvisionnement en lait de brebis est également inférieur à 10%.
Une spéculation agricole qui séduit les jeunes
Fait rarissime dans le monde agricole : plus de 63% des éleveurs ovins professionnels sont âgés de moins de 50 ans (15% étant même âgés de moins de 30 ans), alors que dans le secteur agricole « générique » plus de 60% des agriculteurs wallons ont plus de 50 ans.
Au-delà du capital sympathie suscité par ce ruminant de petite taille, les atouts du mouton pour les jeunes professionnels ne manquent pas : capitaux plus abordables que pour du gros bétail, réhabilitation d’anciennes étables qui ne sont plus aux normes, accessibilité aux femmes, accessibilité aux hors-cadres familiaux (rare en agriculture), possibilité d’installation et d’évolutions progressives, mais aussi une image verte, avec environ ¼ des élevages de plus de 50 brebis qui sont en agriculture biologique (2014).